mercredi 17 août 2011

Ramenez-moi au parc ...





Aujourd'hui avec les autres vieux, on nous a conduit au cinéma, le petit cinéma, à côté de la maison.

Comme d'habitude, le film intéressant était à l'étage, et avec mes vieilles jambes, ils m'ont mise dans la salle du bas. C'était un film en polonais, sous-titré, je ne lis plus assez vite pour ça, et en plus c'était tout noir et violent, j'ai pas tout compris.

En fait c'est pas grave, je crois que j'ai dormi...

Les sorties au cinéma m'ennuient, je préférais quant on allait  au parc.

Oui, c'était vraiment mieux le parc, surtout le mercredi, on croisait des enfants. Je les aime les enfants.

Je sais pas pourquoi je les aime autant maintenant.

Quand j'étais jeune, ils m'agaçaient tout le temps, mais depuis quelques années ils me fascinent.

J'ai envie de les toucher, de les serrer de les embrasser aussi.

Je les trouve dodus et moelleux. Ils sont  comme des pâtisseries dans une vitrine que je regarde avec des yeux diabétiques.
Je les sens sucrés comme des sirops de grenadine.
je les vois et ils semblent portés par les vents, ils sont légers et tourbillonnants.

Au parc, je laissais tomber leurs cris confus, ce mélange de larmes, de rires, de mots,  au fond de mon oreille quasi sourde.
Je fermais les yeux pour faire durer ce flot sonore, le fixer tel un acouphène dans mon océan de silence...

C'est cela, oui, ils tuaient mon silence.

Ils remplissaient à grand coup de vagues géantes de brouhahas ma tête vide de mots.

Lorsque l'un d'eux passait près de moi, je lançais infatigablement une première parole et je dévorais les mots rendus, les sourires, les petits gestes de la main. De temps en temps j'arrivais même à gouter un peu de joue par baisers interposés...

J'aimerais tant que vous me rameniez au parc. Là où mon cœur pouvait encore frisonner...

Vous trouvez  le cinéma plus stimulant et moins banal.

Mais je vous jure que lorsque l'on est devenue une vieille dame,  c'est bon de croiser un enfant ...





13 commentaires:

  1. Quel beau texte.

    Je crois que je serai aussi cette dame sensible à la vie puissance 10

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  2. C'est poignant. Bravo.
    Ce mélange des couleurs, des âges. Comme si la boucle se formait, sans fermeture.
    Tu sens en toi cette âme d'enfant, celle qui ne s'éteint pas? Tu l'aimes encore...

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  3. Un bonbon pour âme, le comme seule LH sait les écrire...

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  4. Je m' en vais tout doucement...c'est tellement beau...
    Tu me fais pleurer...Si seulement on pouvait comme toi comprendre tous les silences...quand il faut..ce serait le Paradis...
    Bisous tendres

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  5. J'ai jamais vraiment eu le temps de passer par ici... voilà que je ferme et je viens ici... Ton texte est magnifique. Je me suis sentie étreinte par une drôle de nostalgie que je ne peux connaitre... Ton écriture est d'une telle empathie... (et je ne parle pas de la poésie, des images et du style fluide et emportant ;) à moins que tu ne sois une très vieille dame? :)

    Merci pour ce beau moment de lecture :)

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  6. Un texte dont on sent combien l'auteur aime les personnes...
    Cela fait du bien à l'âme....

    (je découvre ce blog...)

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  7. Je suis venue plus tôt dans la journée lire cette belle histoire et puis écouter cette chanson qui a bercée mon adolescence. Oui les enfants c'est "la musique du bonheur" et quel dommage d'isoler tant de personnes du monde des vivants juste parce qu'ils deviennent vieux... A ce niveau-là, notre société est bien mal faite et n'a pas compris tout ce que les gens qu'on réduit au mot creux de "vieux" peuvent apporter. Merci pour ce beau texte.
    Amicalement,
    Béa
    ps: j'adore cette chanson où chaque petit bonheur de la vie est énuméré.

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  8. c'est si beau de lire et bon d'écouter
    tendresses de Nanou

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  9. Je reviens d'Espagne où les seňoras mayores se font belles et sortent le soir, seule ou en groupe, et prennent plaisir à s'asseoir en terrasse. J'en ai fait profiter ma mamine... La vie ne s'arrêtent pas pour elles, elles prennent le droit au plaisir de la vie sociale...

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  10. Oh Madame
    lorsque je viendrai visiter mes parents à 35km de Compiègne en octobre prochain, j'emmènerai ma petite fille de 3 ans à Compiègne. Qui sait ? Peut-être pourrons-nous nous rencontrer près des trois clefs ou au pied de Jeanne d'Arc ? Ainsi nous irions au parc.
    Belles respirations colorées et étincelantes à vous !

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  11. Tout en délicatesse, des mots qui parlent d'universalité.

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  12. Merci mes précieuses gens de m'avoir guidée dans les allées enchantées de vos états de lecture... Vers vous tous des baisers odeur savon de marseille de mes souvenirs...


    Patatnik : Merci de votre passage, et prenez bien garde à ne rien croire de ce qui se passe ici tout n'est que pure imagination, invention et poésie... Seule l'émotion y est réelle.

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Des battements d'ailes de vous à moi ...

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