mardi 8 janvier 2019

Le père...




Il a toujours été étrangement secret mon père.

                    Son cartablier énigmatique posé dans un coin du bureau. J'avais l'interdiction formelle de jouer avec. 

                    Pourtant, lorsqu'il avait le dos tourné, il m'arrivait souvent de me travestir, d'un tablier brodé de dorures. Je le portais pour jouer. Du côté grosse enveloppe bleu ciel et blanche les jours de banquets et devenais prestigieux cordon bleu en gants blancs.
Du côté drapeau noir, pirate en larmes, les jours plombés de tempêtes, je jouais du compas sur des cartes du ciel, pour trouver en orient un lac d'amour ou une belle pierre dans des deltas rayonnants...

                    Je farfouillais dans ses trésors, ça brillait d'acacias, ça me regardait par des fenêtres géométriques, ça grouillait de lettres étranges, de poisons, d'odeurs de soufre...

                    Certains soirs, il partait seul…
                    Je n'aimais pas ses drôles de sorties vespérales. Je le savais aux premières loges d'un spectacle costumé où il m'était interdit d'aller.

                    J'ai donc attendu de grandir, pour qu'il m'invite. Et un jour, dans une salle humide, il m'a raconté ses histoires de pluies, de couvreurs, de tuiles, de truelle, de plâtre et de ciment...

                    Quelques années plus tard, en visiteuse, je passais la porte.

                    Dessous la voute étoilée, je le suivis en silence, la parole perdue, dans un premier voyage. 

                    Mon père, ce chevalier du soleil, dans son univers, guidait ma marche sur terre et du coin de l'œil déjà me montrait le ciel.





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