mardi 27 septembre 2011

Une histoire de mots...



Pose toi sur ma feuille
Chevauche une lettre
Suis le sillon d'encre 
La nerveuse courbe
En remontant la plume
Escalade ma main gauche
Puis droit devant
Tu trouveras alors
L'organe 
Où naissent mes mots
En quelques battements
Tu sauras 
A quel point  l’équilibre
De l'ensemble est fragile
 Me trouver derrière un mot
C'est déjà m'avoir 
Tout pris
Ne me cacher que derrière
Mes mots 
C'est déjà t'avoir tout donné...









lundi 26 septembre 2011

C'est purement physique...





La physique et moi, on est marié...

Au tout début nous étions du genre physique théorique.

On gravitait l'un autour de l'autre, on émettait des hypothèses sur le magnétisme des corps...


 Puis on est assez vite devenu de la  physique expérimentale.

On s'attachait à découvrir le fonctionnement de nos univers, par de multiples et innombrables expériences et manipulations.

Nous nous préparions, nous expérimentions et souvent évaluions les résultats obtenus, en essayant le plus possible de nous détacher de nos modèles .

On modifiait avec prudence un paramètre  à la fois pour mesurer son effet sur le comportement ou les pensées de l'autre...

Mais, je suis bien forcée de faire, ici, aujourd'hui, le constat que nous sommes entrés dans la phase critique de la physique mathématique.

On s'attache, méthodiquement à trouver la bonne méthode de décomposition. Nous essayons de résoudre au mieux, et de calculer au plus juste nos différentiels...

Et après cela, vous osez encore me dire que la science n'avait pas tout prévu !







.

mercredi 21 septembre 2011

Sur l'établi...



Ils ont fait un appartement dans ton garage.

Ça sent la cuisine et le propre.

Mais par delà les murs blancs, je vois encore les ombres de mes bonheurs enfantins lorsque tu m’asseyais sur l'établi.

J'avais cinq ou six ans, peut être moins...

Je trônais sur les planches de bois martelées. Je m'accoudais à l'étau de fer usé. Je devenais les petites mains passeuses d'instruments, hésitantes et concentrées. J'attendais que tu nommes ou désignes d'un geste du menton l’outil que je devrais trouver au plus vite. Tu finissais ton travail un oeil sur moi, la tête pas entièrement à ton ouvrage.

Tu avais dessiné chacun de tes outils minutieusement, sur le mur qui les portait, au fur et à mesure qu'ils entraient dans ta collection.

C'était ton trésor à toi.

Une galerie de trophées, exposés dans un coin de ton garage, dans des odeurs de cuve à mazout, de transpiration, de vieux chiffons, d'huile de vidange, de bois sec, et de vieilles caisses à vendanges...

Dessous l'établi dans un tiroir, tu avais gardé le premier jeu de construction en bois de papa, et un méccano rouillé qui avait été maintes fois monté et démonté.

Mes petites mains fragiles farfouillaient tes trésors. Elles ouvraient tes boites à souvenirs, déshabillaient ton passé, étalaient sur le sol en béton gris des morceaux de ta vie et elles égrainaient sur ton présent l'anxiété de celui qui veillait sur mes petites mains maladroites d'enfant.

Je bricolais sous tes yeux aimants, tu me laissais tailler des bouts de bois, les écraser à grands coups de marteau, les scier pour n'en rien faire ...

Mon envie de bricoler s'envolait souvent, comme elle était venue. Tel un papillon passant sans plus d'hésitation à une autre fleur, je te laissais là, à ton garage et à tes trésors chamboulés...

J'oubliais derrière moi, un établi plein d'outils séparés de leurs ombres murales, des copeaux de bois, des tiroirs ouverts, un vent de démence avait balayé l'ordre de ton univers. 

Je déposais un baiser sur ta joue molle et piquante, et m'enfuyais déterrer d'autres merveilles, dans la cuisine de Mamie.

Bien des années après ; j'ai trouvé en vidant ta maison, dans ton tiroir à souvenirs, des bouts de bois mal taillés et écrasés que tu avais précieusement gardés.








Le texte est venu en croisant les images de Fabien. Je suis heureuse de ce partage ses clichés m'ont vraiment touchés. Merci m'sieur  ! :*

lundi 19 septembre 2011

L'intrus sur l'étagère...






J'ai conservé son vieux journal intime, précieusement rangé, sur l'étage de la pléiade.

Les secrets, potins et autres banalités de la vie de Mamie, ainsi placés entre André Malraux et Karl Marx.
En effet ne possédant pas les ouvrages de Marivaux* et  Martin du Gard*, le hasard alphabétique l'a placé là... Je souris souvent à la vue de ce vieux cahier coincé entre ces deux génies dont elle devait ignorer jusqu'aux noms. Je l'imagine parlant de la condition humaine et fumant avec André ou s'offrir quelques échanges polis dans la langue de Goethe avec Karl... Natürlich !

C'est vraiment un drôle de voisinage pour une vielle dame née en Allemagne dans un petit village de Rhénanie, à Idar-Oberstein non loin de la belle ville de Trier, et enrôlée de force dans les jeunesses Hitlériennes, comme tous les Bons Aryens de sa génération.

Ça doit vraiment pas plaire à Malraux cette histoire...
Ce dut être complétement surnaturel pour lui de se retrouver ainsi, à côté du démon absolu. Passé le temps du mépris,  Mamie s'est certainement rapprocher un peu, a brisé les voix du silence pour faire connaissance du bout des mots et rendre l'espoir à l'homme précaire de la littérature ... J'ai cessé de m'inquiéter pour la tranquillité d'André en m'apercevant que de l'autre côté l'épaulait Mallarmé.

Je me fais bien plus de soucis pour le voisin de gauche de Mamie. Le premier contact me sembla plus simple. Ils avaient déjà un bon capital commun afin de se lier plus aisément. Ils partageaient la Rhénanie, le plattdeutsch et Mamie ne devait pas manquer d'intérêt aux yeux de Karl en tant qu'ancienne ouvrière au bas salaire dans une usine de tabac. Il avait dû néanmoins s'arracher quelques poils à la barbe, mon Karl, en écoutant Mamie parler de sa sainte famille ou en découvrant la misère de sa philosophie. J'attends d'ailleurs, sous peu une révolution à cet endroit de la bibliothèque. Le chevalier de la noble conscience devenu velu frustré, obligé d'éviter toutes discussions en économie et philosophie. Je ne sais combien de temps il tiendra encore.


Car ce que je ne vous dis pas,
c'est qu'à côté de lui, le seul bel ami 
que la pléiade lui a fourni,
est à particule un bourgeois
de Maupassant, Pour Karl c'est pas la joie !













* Je suis preneuse au cas où vous n'en feriez rien ;)

mardi 13 septembre 2011

L'envol des mots ...


J'ai trempé ma plume
dans le noir
noix de galle
pour vous écrire ce matin
de légères pensées
des mots aériens
mais mon encre
autrement
en avait décidé
sous mes yeux écarquillés
je l'ai vu
de mes lignes
s'arracher
de ma feuille 
se libérer
par un pied de bureau 
s'évader
et à la terre
retourner.
Ma plume frissonnait
de cette belle liberté
pas plus
il n'en fallut
pour qu'à l'oiseau
elle fut rendue.
Impuissante
je restai
à admirer
s'éloigner
en vol ramé
toutes mes pensées...





dimanche 11 septembre 2011

Départ...


Il se leva comme chaque matin.
Enfin presque...
Il se fit beau.
Cira ses chaussures, enfila son costume des grandes occasions.
La veille il avait mis de l'ordre dans ses papiers, rangé ses affaires...
Il prit le chemin qui descendait vers la pharmacie d'une amie.
S'arrêta un moment pour lui laisser les clés de la maison.
Il a souri tendrement,
Il n'était pas très expressif, il n'a rien expliqué.
Il ne parlait jamais de lui...
Il monta dans sa voiture.
Conduisit un peu.
Il se gara près du pont.
Descendit et marcha avec certainement mille choses à l'esprit.
Des choses chargées de flous, d'ombres et de vide...
Se posta sur la voie et attendit ce train qui l'emporta au loin.




samedi 10 septembre 2011

Le recommandé...


Mon nom ?

Jeanne Lepage.

Je suis la dame du 18 des Cisterciens. Vous savez c'est en travaux en ce moment.

Ils refont les trottoirs.

Du coup, il faut faire attention pour venir.

Quant il pleut ça glisse, et y a pas mal de boue.

Enfin, il fait beau aujourd'hui, un peu frisquet mais on a un joli soleil de fin d'été.

Je suis passée devant l’école primaire au moment de la récréation. Je suis restée là, à regarder, à écouter jusqu'au coup de sifflet. Ça courrait dans tous les sens, ça riait, ça criait...

Un vrai spectacle !

Je choisis toujours l'heure de la récréation pour aller chercher mon pain. C'est à dix heures trente la récréation.

Je peux bien vous le dire, en fait, je ne mange pas de pain. C'est trop mou. C'est pas pratique le mou avec un dentier.

Mais, j'en achète quand même, comme ça je me promène. Je vois du monde...

Je remonte doucement par le sentier des Forges, je passe devant l'église.

Y avait la petite camionnette d'un Menuisier de Pertuis devant la porte de la sacristie ce matin.
Je pense qu'ils vont enfin réparer le portail de l'église. Il serait temps depuis la tempête de quatre-vingt-seize que ça traine cette histoire !

Enfin, vous me direz ça fait bien longtemps qu'il n'y a plus de messe ni de curé dans notre village.

J'aimais bien aller à la messe.

Maintenant je suis obligée de la regarder à la télévision, c'est quand même pas pareil ! C'est dommage.

Je me suis arrêtée sur le petit banc, sous les platanes devant le boulodrome. Personne ne jouait ce matin, remarquez il n'y a jamais personne en semaine le matin, ça commence un peu à arriver vers quatorze heures.

Mais je connais plus personne qui joue.

Je suis restée assise un dizaine de minutes. J'ai donné un peu de mon pain aux pigeons.
Ils sont bien gras les pigeons du boulodrome, Vous trouvez pas ?

Je crois bien, qu'ils m'attendent le matin.

Et puis après, je rentre doucement, et je ne bouge plus.

Mais, je suis bien toute seule, je manque de rien.

Je suis pas malade. J'ai encore toute ma tête.

Et puis, un matin comme aujourd'hui, ça me change un peu. Ça me fait faire un plus grand tour, de passer vous voir...

Qu'est-ce que je viens faire ?

Ah, oui, pardon Monsieur. Je me dépêche...

Voilà,  j’avais juste un recommandé à récupérer...





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